La vie rurale

A la fin du 19e siècle et au début du 20e la désertification des communes rurales a commencé. Elle est un effet de l’ère industrielle accentuée par la mécanisation des travaux agricoles, par l’arrivée des faucheuses, batteuses, charrues Brabant. Ce modernisme est mal apprécié par les journaliers qui voient disparaître leur outil de travail : faucheurs, laboureurs, saisonniers etc. Certains iront jusqu’à détériorer les nouvelles machines. La population Brainanaise, qui vit essentiellement des ressources de la terre, n’échappe pas à cette mutation favorisée notamment par le train, moyen de communication très répandu. De nombreux jeunes partent pour la ville. Il se dit même que pour réussir il faut monter à Paris « Je vais dans la capitale ! ». Ils trouvent un emploi dans les administrations et services publics (chemins de fer le P.L.M., métropolitain, gaz, les postes, les douanes, etc). Certains reviennent pendant leurs congés et sont enviés par ceux restés à la terre qui disent : « nous c’est 365 jours sur 365 jours ». Ils restaurent une maison achetée ou héritée qu’ils occuperont à l’heure de la retraite. C’est le cas pour Joseph MAÎTRE et son épouse Lucie née PERNAUDET, pour Irènée BRENIAUX et sa femme Hélène née BRENOT qui sera la première centenaire du village. Et bien d’autres tels que Louis AUBERT qui sera maire et fera installer la rampe sur le sentier du cimetière, DUMONT, CUINET, Gaston ANTOINE...

L’utilisation des bœufs comme moyen de traction disparaît aussi. Le cheval est plus maniable avec les appareils nouveaux. Il est plus rapide à réagir mais moins puissant. Le bœuf est lent mais sa méthode d’attelage décuple sa force, car il pousse sur le joug avec la tête tandis que le cheval tire avec le poitrail. La famille d’Adrien Breniaux a été la dernière à en posséder une paire. Elle l’a vendue en 1953 pour acheter un cheval. Je vous livre un souvenir personnel. Agé de 4 ans ½ j’ai marché devant les bœufs attelés avec un grand aiguillon sur l’épaule. Qu’est ce qu’il était grand cet engin ! Je ne crois pas avoir parcouru beaucoup de chemin.

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Girod, oncle de Jean BRENIAUX, avec sa paire de boeufs

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Paul BRENIAUX et son cheval Etoile

Ces changements de méthode de travail vont entraîner la disparition d’autres métiers : laboureur avec l’arrivée des tracteurs, maréchal-ferrant, meunier, scieur de bois, sabotier.

Pour abaisser leurs coûts de production, les cultivateurs éprouvent le besoin de se regrouper pour acheter des matériels utilisés périodiquement. Ainsi naît le syndicat des vignerons pour faire l’acquisition de cylindres cannelés (écrase le fruit pas les pépins), d’un pressoir, d’un alambic. Ils achètent aussi des rouleaux pour écraser les mottes, un trieur à grains, un pulvérisateur, un appareil pour étendre les taupinières. Une C.U.M.A. (coopérative d’utilisation de matériel agricole) est créée vers 1960 pour l’achat d’une moissonneuse-batteuse.

Hormis divers métiers la population est principalement paysanne. En 1955, on dénombre environ une trentaine d’exploitations agricoles. L’appellation d’agriculteur (ou encore chef d'exploitation) pour les administrations succède à celle de cultivateur. Les fermes sont petites, quelques vaches et un cheval ou deux dans les plus importantes. Le lait est la principale production et sa vente à la coopérative constitue l’essentiel des revenus. Ils sont complétés par l’élevage de bovins et de porcs. Ces derniers sont engraissés pour la consommation familiale ou pour la vente des porcelets. On pratique des cultures vivrières : pommes de terre, céréales, betteraves et vigne. Chaque foyer bénéficie d’un affouage qui lui procure du bois à bon marché acquis auprès de la commune, bois qu’il doit fabriquer lui-même.

Voici deux anecdotes d’anciens paysans. Ils disaient « quand tu achètes une vache il faut toujours la monter mais jamais la descendre » Cela voulait dire qu’une vache de la plaine serait meilleure en montagne, l’herbe étant plus grasse et il ne fallait pas faire l’inverse. Des petits malicieux disaient qu’il fallait adopter le même principe avec les femmes. La seconde était «  achète des prés près et marie ta fille loin ». A chacun d’apprécier. 

La modernisation des travaux agricoles après la seconde guerre va améliorer les conditions de vie du paysan et supprimer une partie de la pénibilité de son travail. Elle provoque une réorganisation de l’agriculture. Les nouvelles méthodes nécessitent des investissements importants et les exploitations ne s’avèrent plus rentables. La nouvelle politique agricole va bouleverser le mode de vie des paysans. Certains exerceront un nouveau métier et d’autres quitteront le village pour la ville. Aujourd’hui, il n’existe plus que quatre exploitations agricoles dont un vigneron au village, Brainans étant dans la zone d’appellation d’origine contrôlée « côte du Jura ». Parfois l’épouse occupe un emploi dans la ville voisine. Maintenant le paysan part en vacances. Des remplaçants ont été formés.